Durant les années 1970, alors qu’émerge une littérature proprement franco-ontarienne, de nouveaux lieux de publications sont fondés. Le tout commence à Sudbury où les Éditions Prise de parole ouvrent leurs portes en 1973, puis ce sera au tour d’Ottawa de se lancer dans le monde de l’édition franco-ontarien, avec la création des Éditions L’Interligne en 1981 et des Éditions du Vermillon en 1982. Ces trois maisons comblent un vide important dans le milieu éditorial de l’Ontario français. Jacques Flamand, qui a cofondé les Éditions du Vermillon avec Monique Bertoli, se souvient d’une époque où « il y avait beaucoup d’œuvres et peut-être pas assez de possibilités de les faire connaître1».
Les deux maisons d’édition d'Ottawa ont des parcours différents car elles ne poursuivent pas les mêmes objectifs. Alors que L’Interligne s’est donné comme mission de publier des ouvrages sur la communauté franco-ontarienne, ses réalités, ses rêves et ses ambitions, Le Vermillon a choisi quant à elle de publier des ouvrages plus diversifiés. Durant les premières décennies, L’Interligne cherche à mieux faire connaître le patrimoine culturel des Franco-Ontariens par la publication d’ouvrages à caractère historique : biographies, mémoires, documents historiques, monographies. Curieusement, le premier livre qui y est publié appartient à un genre bien particulier : il s’agit d’un « antiphoto-roman », du dramaturge Robert Marinier, intitulé Lafortune et Lachance. Le Vermillon, pour sa part, se spécialise dans la publication de recueils de poésie et de livres pour enfants, dont de magnifiques albums illustrés.
Avec le temps, les deux maisons se transforment. Au Vermillon, cette transformation prend la forme d’une diversification du genre d’œuvres publiées. La maison d’édition publie aujourd’hui des livres illustrés pour enfants, des romans pour la jeunesse, des bandes dessinées, des romans et des récits pour adultes, de la poésie, des essais et des guides pédagogiques. L’Interligne pour sa part change d’orientation quand Stefan Psenak en prend la direction, en 1997. Psenak, lui-même écrivain, donne une mission plus littéraire à la maison : le roman, la poésie et la littérature jeunesse occupent alors une plus grande place dans le catalogue. L’évolution de ces deux maisons d’édition illustre bien celle de la littérature franco-ontarienne dans son ensemble : d’abord pensée en fonction de sa capacité de représenter la réalité des Franco-Ontariens, elle est à présent aussi diversifiée que toute autre littérature.
Lise Leblanc, responsable de la promotion aux Éditions L’Interligne, Monique Bertoli et Jacques Flamand des Éditions du Vermillon, au Salon du livre de Montréal, novembre 1984. Photo : Jules Villemaire.
Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Les Éditions L'Interligne (C86), Ph167-469.
1 Monique Bertoli et Jacques Flamand, entrevue accordée à Joël Beddows et Lucie Hotte dans le cadre du projet « Construction d’une mémoire française à Ottawa : savoirs communautaires et réseaux sociaux », 2013.