Une jeunesse militante

Les années 1960 représentent un point tournant pour la jeunesse francophone d’Ottawa. Dans la capitale, comme ailleurs dans le monde, la montée de la contre-culture et de la démocratie participative conduira plusieurs jeunes issus du baby-boom (nés entre 1945 et 1960) à remettre en cause le traditionalisme et l’élitisme de leurs aînés. C’est l’époque des grandes manifestations étudiantes, de l’entrée en scène des hippies, du psychédélisme et de la critique de l’autorité sous toutes ses formes. L’Association de la jeunesse franco-ontarienne (AJFO), fondée en 1949, a du mal à s’adapter à ces nouvelles réalités. C’était prévisible : mise sur pied avec l’appui de mouvements adultes, comme l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario et l’Ordre de Jacques-Cartier, AJFO en partageait toujours les valeurs traditionnelles. En mai 1968 – moment épique s’il en est un –, de jeunes dissidents fondent l’Association provinciale des mouvements de jeunes de l’Ontario français (APMJOF), un organisme qui se veut plus revendicateur. La rivalité entre l’AJFO, beaucoup plus modérée, et l’APMJOF sera grande. Pendant deux ans, les deux associations se livreront une guerre sourde, jusqu’au jour où, épuisées par tant de conflits, elles accepteront de fusionner. En 1970, leur réconciliation donne ainsi naissance à Direction-Jeunesse (DJ).

DJ ne tarde pas à s’afficher comme l’un des chefs de file les plus engagés et les plus militants de la francophonie d’Ottawa. Comme l’AJFO avant elle, son action s’exerce au-delà de la capitale et s’étend dans toutes les grandes régions francophones de la province. Elle a le double mandat d’accroître chez les jeunes le sentiment d’appartenance à la communauté franco-ontarienne et de favoriser leur esprit d’initiative. Mais c’est indéniablement sur le plan politique qu’elle aura la plus grande influence. Elle est particulièrement active dans le champ de l’éducation, où elle revendique des écoles secondaires, des collèges communautaires et une université de langue française. En 1979, elle fait paraître Le Complexe des différents [sic], une étude qui souligne la marginalisation des francophones dans les universités bilingues de la province. Au printemps 1992, elle organise une grande manifestation à Queen’s Park pour réclamer la création d’un réseau de collèges communautaires de langue française. Jusqu'à sa disparition en 2002, Direction-Jeunesse a été de tous les grands combats menés par la francophonie ottavienne et ontarienne, et l’un de ses plus ardents défenseurs.

 

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Explosion jeunesse 1978, le rallye de la jeunesse canadienne-française hors Québec eut lieu les 26 et 27 mai 1978. Plus de mille jeunes participèrent à la marche sur la colline parlementaire et revendiquèrent des réponses claires et nettes concernant le développement des communautés francophones hors Québec, Ottawa.

Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Fédération de la jeunesse canadienne-française (C82), Ph163-A-3.