La voix d'Ottawa à Queen's Park

La présence de la francophonie d’Ottawa sur la scène politique provinciale s’affirme avec la montée du secteur public. Avec la création des premières écoles secondaires publiques de langue française dans la région, l’étatisation de l’hôpital Montfort, de l’Université d’Ottawa, elle voudra intervenir davantage du côté de Queen’s Park. La circonscription d’Ottawa-Vanier (auparavant Ottawa-Est) lui permettra d’y faire entendre sa voix. 

C’est un de ses représentants, Albert Roy, élu la première fois en 1971 sous la bannière du Parti libéral à Queens’ Park, puis réélu en 1975, 1977 et 1981, qui jette les bases de la future loi sur les services en français en Ontario.  Albert Roy dépose un projet de loi privé (le bill 89) en 1978 qui obligerait la province à offrir tous ses services en français.  Des députés de tous les partis l’appuient après une énorme campagne de sensibilisation menée par l’ACFO. Mais le projet de loi est rejeté en troisième lecture. Le premier ministre de l’époque, le conservateur Bill Davis, s’était pourtant montré sympathique à l’idée d’une loi-cadre sur les services en français.  Il choisit toutefois d’aller de l’avant avec une politique d’accroissement graduel des services plutôt que de reconnaître officiellement le bilinguisme, de peur des réactions de la majorité anglophone de la province.

Ce n’est que partie remise ! La Loi sur les services en français sera adoptée quelques années plus tard, sous le gouvernement libéral de David Peterson. Ce dernier en avait fait la promesse lors de la campagne électorale de 1985. C’est au ministre délégué aux Affaires francophones, Bernard Grandmaître, qu’il confie la responsabilité de la faire rédiger et adopter. Bernard Grandmaître représente Ottawa-Est depuis l’élection complémentaire de décembre 1984, rendue nécessaire par le passage d’Albert Roy sur la scène fédérale. Il est réélu quatre fois, de 1985 à 1995.  La loi sera déposée pour lecture finale et assentiment royal le 18 novembre 1986.  Elle sera adoptée à l’unanimité, suite à d’intenses négociations menées de main de maître par le ministre. La loi 8, comme on l’appelle familièrement, entre en vigueur trois ans plus tard.  Le gouvernement devra dorénavant fournir ses services en français là où le nombre le justifie, à savoir dans 22 régions de la province, parmi lesquelles la totalité de la municipalité régionale d’Ottawa-Carleton.

David Peterson dira de la loi 8 qu’elle est la dernière étape vers le bilinguisme officiel de l’Ontario. Mais cette étape n’est pas encore franchie dans la province. Madeleine Meilleur, qui représentera Ottawa-Vanier à Queen’s Park de 2003 à 2016 et qui sera elle aussi ministre déléguée aux Affaires francophones, s’emploiera plutôt à s’assurer de l’application de la loi. Elle crée le Commissariat aux services en français en 2007, qui en deviendra le chien de garde.

 

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Bernard Grandmaître au bureau de scrutin, lors des élections provinciales en Ontario, 10 septembre 1987, Photo : Armand Legault, Le Droit.

Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Le Droit (C71), Ph92-7-10091987BER-5.

Photographie en noir et blanc d’un homme d’âge mûr en costume-cravate.  Il porte des lunettes. Il est debout devant un bureau de vote tenu par deux femmes du troisième âge. L’une d’entre elles dépose un bulletin de vote dans la boîte de scrutin. À l’arrière-plan, d’autres bureaux de vote.