Ottawa, sous la plume de Daniel Poliquin

[I]l n’y a presque rien d’ouvert à Ottawa le dimanche, les boutiques ferment tôt, les restaurants sont froids et mauvais, les gens sont plates, les francophones parlent mal, leur emploi est inintéressant […]1.

Ottawa, une ville ennuyante ? Peut-être du point de vue de certains personnages de Daniel Poliquin, l’écrivain franco-ontarien le plus étroitement associé à la ville d’Ottawa. Mais du sien, jamais ! Il est plutôt connu pour ses personnages hauts en couleur et son style mordant.

Né en 1953, Poliquin grandit dans la Côte-de-Sable, un quartier d’Ottawa. Il devient traducteur et interprète pour la fonction publique et la Chambre des communes, tout en menant parallèlement une carrière d’écrivain. À ce jour, il a publié treize ouvrages de fiction et une biographie romancée de René Lévesque. De ceux-ci, deux recueils de nouvelles, Les nouvelles de la capitale (1987) et Le Canon des Gobelins (1995), et six romans, Temps pascal (1982), La Côte de Sable (1990, sous le titre Visions de Jude), L’écureuil noir (1994), La kermesse (2006), L’historien de rien (2012) et Cherche rouquine, coupe garçonne (2017) se déroulent, du moins en partie, à Ottawa.

Sous la plume de Poliquin, la ville d’Ottawa est dépeinte comme un espace cosmopolite et mouvementé. C’est particulièrement le cas de la Côte-de-Sable à cause de sa population de diplomates et d’étudiants qui se renouvelle constamment :

La population va et vient, elle change tout le temps. Les diplomates se renouvellent tous les trois ans, les députés et les étudiants tous les quatre ans, les fonctionnaires aux trente ans. Les universitaires y sont presque invisibles : ils disparaissent au printemps et ne reviennent qu’en automne, on ne les voit jamais la fin de semaine et, après la retraite, ils sont remplacés par d’autres qui sont tout aussi invisibles. Les gens avec qui on se lie ne seront pas là demain, ce qui me plaît beaucoup2

Qu’ils soient originaires de la région ou des coins les plus éloignés du monde, les personnages de Poliquin n’hésitent pas à s’ouvrir aux autres. Ils croient qu’il « faut mélanger les cultures des fois, la vie a meilleur goût ainsi3 ». La ville d’Ottawa apparaît donc comme un lieu de rencontre, un carrefour où convergent toutes les cultures. 

C’est en français que se vit cette rencontre dans ses romans. Ses personnages parlent français entre eux, peu importe leurs origines. Même ses personnages anglophones s’expriment le plus souvent en français. Poliquin francise aussi la ville en utilisant la version locale de certaines dénominations anglaises. Par exemple, sous sa plume, le quartier « New Edinburgh » devient le « Petit Édimbourg4 »; le carré Anglesea devient le « carré Anglicy5 ». 

Pour découvrir Ottawa, les livres de Daniel Poliquin sont incontournables. Ils donnent envie d’explorer la ville, de marcher dans ses pas pour découvrir, à notre tour, ces lieux qu’il nous raconte.

 

 

1 Daniel Poliquin, Nouvelles de la capitale, suivi de Le Canon des Gobelins, Ottawa, Le Nordir, coll. « Bibliothèque canadienne-française », 2001 [1987 et 1995], p. 111.

2 Daniel Poliquin, L’écureuil noir, Montréal, Boréal, coll. « Boréal compact », 1999 [1994], p. 22.

3 Daniel Poliquin, La Côte de Sable, Montréal, Bibliothèque québécoise, 2000 [1990, sous le titre Visions de Jude], p. 257.

4 Daniel Poliquin, Nouvelles de la capitale, suivi de Le Canon des Gobelins, op. cit., p. 114.

5 Daniel Poliquin, L’historien de rien, Montréal, Boréal, 2012, p. 55. 

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Daniel Poliquin, auteur, Ottawa, 9 novembre 1994. Photo : Étienne Morin, Le Droit.

Source : Université d'Ottawa, CRCCF, Fonds Le Droit (C71), Ph92-9- 091194POL18.

Photographie en couleur d’un homme souriant d’âge moyen, en costume foncé. Il est assis, son index gauche est appuyé contre sa tempe et son pouce gauche, contre sa mâchoire.